Les chants qui accompagnent les cérémonies religieuses de la nativité ne
sont ni des prières, ni des chants de louange. Il s'agit pour les
fidèles de chanter pour exprimer collectivement leur joie, à l'église,
comme à la maison.
Comme les évangiles de Luc et Mathieu, les seuls à évoquer la nativité,
restent très discrets sur cet évènement, la tradition populaire a puisé
dans les prophéties de l'ancien testament ou les évangiles apocryphes, des
récits qui accentuaient le caractère merveilleux de la naissance et de
la vie du Christ.
Les chants de Noël se présentent comme des œuvres vocales avec ou sans
refrain et relèvent d'une grande tradition musico-littéraire.
L'origine de ces chants peut-être recherchée dans la technique des
tropes, puis des drames liturgiques joués au moyen âge pendant le cycle
de Noël, et enfin au 15ème siècle dans les mystères qui leur succèdent,
mais ce n'est qu'à partir du 16ème siècle, quand les mystères sont
interdits, que se développe un important répertoire de chants de Noël,
composés par des poètes parisiens ou provinciaux, associés à des
mélodies déjà connues, sur les timbres en vogue. Ces Noëls sont
largement diffusés dans toute la société traditionnelle par les
colporteurs qui vendent dans les campagnes les plus reculées des "bibles
de Noël" dont les textes sont en Français et en langue régionale,
quelquefois en latin, et dont les illustrations, souvent des
récupérations de bois gravés plus anciens, rappellent les épisodes de la
nativité. De éditeurs Troyens, comme les Oudot et les Garnier, se sont
spécialisés dans cette production de masse des bibles de Noël. D'autres
éditeurs, spécialistes de l'imagerie religieuse populaire, vendue aussi
par colportage, ont imprimé des feuilles volantes représentant la
nativité avec de part et d'autre de l'image des cantiques. Chaque
famille possédait un exemplaire de ces "grandes bibles de Noël". Chacun
était capable de déchiffrer le texte ou de l'apprendre en l'écoutant. La
musique était simplement indiquée : "Sur l'air de...". Tout le monde
connaissait la mélodie, même si la partition originale était une bluette
ou une chanson à boire... à la mode. Et tout le monde chantait les
couplets dans sa langue quotidienne, seuls ceux qui prêtaient leur voix
aux anges et à la vierge chantaient en français ou en latin. Ces Noëls
étaient chantés dans l'intimité familiale et amusaient beaucoup car ils
alternaient les dialogues, les répliques bouffonnes, les détails
cocasses et les imitations de cris d'animaux. Aussi avait-on pris souvent
l'habitude de les interpréter en dehors du cycle des 12 jours, pour
retrouver un esprit de fête le temps d'une veillée.
Dans les grandes villes, aux 17ème et 18ème siècles, des musiciens très
célèbres composaient des partitions de Noël destinées à être chantées
par des chorales dans les églises ou exécutées dans les salons
aristocratiques.
Au 18ème siècle, dans toute l'Europe, se multiplie la composition
d'œuvres musicales, comme les oratorios, les cantates, les messes, les
concertos par les plus grands compositeurs : Mozart, Bach, Haendel,
Vivaldi...
Les cantiques de Noël populaires, interdits par la révolution, ne
disparaissent pas de la tradition orale. Au 19ème siècle, de nouveaux
chants apparaissent, qui sont encore célèbres aujourd'hui.
"Il est né le divin enfant", dont on ignore l'auteur et la date de
création, est publié pour la 1ère fois dans une bible de Noël Lorraine,
en 1874. Sa musique est un air de cor de chasse du 17ème siècle "La tête
bizarde".
L'origine du chant "Les anges dans nos campagnes" est incertaine. Pour
les uns, il serait l'œuvre de Wilfrid Moreau, Poitevin, pour les autres,
il s'agirait d'un ancien Noël Languedocien.
Le fameux "Minuit Chrétiens" est une création de Placide Clappeau,
marchand de vin à Roquemaure et poète Provençal. Il aurait écrit les
paroles pour l'épouse d'un ingénieur qui était cantatrice
professionnelle. Cette dernière demanda au compositeur Adam, de
l'opéra-comique, d'en composer la musique, en 1847. Le baryton Faure
rendit ce chant célèbre dans le monde entier. Si ce "Minuit Chrétiens"
reste encore de nos jours un grand succès des chants de Noël, à sa
création, il fut peu apprécié, parce que jugé "trop flonflon
d'opérette".
"Douce nuit" c'est un chant originaire d'Allemagne. Il fut composé en
décembre 1818 par Joseph Morh, prêtre de l'église St Nicolas d'Obendor,
près de Salzbourg. L'instituteur d'un village voisin, également
organiste, devait l'interpréter, mais les souris ayant mis le soufflet
hors d'état, il dut se contenter de le jouer à la guitare. Le facteur
d'orgues emporta avec lui au Tyrol la partition où elle fut interprétée
par des chanteurs professionnels. Le succès ne se démentit pas et ce
chant fit le tour du monde.
Dans les autres succès planétaires, il faut citer "Mon beau sapin",
aussi originaire d'Allemagne en 1824. Son auteur le professeur Ernst
Anschütz, de Leipzig, aurait pris pour musique une veille chanson
populaire du 16ème siècle. Ce chant fait du sapin le symbole de Noël. En
Allemagne, le soir du 24 décembre, les familles, au cours de la Sainte
veillée, entonnent ce chant en ouvrant les portes de la salle où se
trouve le sapin illuminé, pour faire découvrir aux plus petits.